Altermondialisme et féminisme

De l’altermondialisme et du féminisme.

Comment peut-on infuser dans son cheminement intellectuel le discours altermondialiste avec des relents de réserve capitaliste et de raisons et justifications socio-culturelles sur une page semblant plus chlorée que les piscines des Motels ?

Un autre monde est possible, et c’est un voyage à envisager qui ne peut souffrir un sens unique. J’allais ajouter « à mon sens » par habitude et une sacro-sainte prudence acquise par gifles répétées. Il s’agit bien du sens que je donne à cet autre monde, sens de la marche à suivre « peut-être », mais je m’en dépouille en propriété, ce n’est pas à mon sens, c’est le sens du voyage comme projet à concrétiser. Constat.

« Altermondoviser[1]» c’est avant tout viser l’Homme, l’humaine définition et « déconifier[2]» l’essentiel.
Peut-être qu’un jour les hommes pourront circuler librement et que s’inversera la logique marchande. Une parcelle-émanation me fait rôder sur l’épuisement pétrolier, ça collerait dans le paysage de l’à venir que je métaphorise si souvent et décollerait les semelles des nécessités matérielles. J’aurais aimé voir cet à venir venu. Il en sera autrement puisque la patience active s’éternise toujours.
Attentisme est un tueur en série.

Décrire en définition « altermondialiste » n’est pas protéger ses acquis. Être altermondialiste n’est pas uniquement une projection politique. Cela se vit.

La considération statutaire humaine pose le socle de l’altermondialisme et par là même je pense que le féminisme devient un principe à incruster sur les tables grammaticales de l’idée.
Car comment altermondoviser en s’asseyant sur le trône du code Napoléon et sur ceux des cultures sexuées telles que la judéo-chrétienne par exemple ? Code de hiérarchie sexuée dont il reste, sinon des effets, au moins une difficile mise en application dans le courant de ses ravalements successifs en France, et, hélas, une influence quasi clonale en d’autres lieux. Ce serait incohérent même si une loi régionale clonée de l’appendice codal concerné vient légaliser la minorité féminine, jamais elle ne peut se justifier et encore moins dans la vision altermondialiste.
Il faut commencer par décider (oh oh, j’avais un beau pléonasme qui me chatouillait les synapses, mais je vais le garder sous gausse), donc il faut commencer par décider d’être selon un code « dénapoléonisé[3]» à l’extrême.

Le féminisme en cela doit se vivre dans la moindre parcelle masculinisée de la pensée et de l’acte, pour rendre à l’humain sa chance d’à venir. De la préserver et concrétiser l’équilibre en tant que justice vitale => comment envisager un monde humain respectant tout être et répartissant justement les « richesses » si par ailleurs une moitié de l’humanité est entravée par une minorité « chosifiante[4]» ?

Le féminisme n’est que la clairvoyance posée sur la route altermondialiste.

Je n’ai jamais placé et ne peux placer une culture au-dessus d’une autre. Il ne peut être une loi d’évidence décrétant « la » culture primordiale.
Plier à une culture comme dogme n’est pas qu’un confort, cependant c’est un confort. Plier sans admission d’ouverture d’une culture à l’autre c’est se ranger à des intérêts propres dans un système dysfonctionnel légitimé par son antériorité. Or l’antériorité ne devrait se reconnaître qu’en créativité dans la préservation des droits d’auteur. La reconnaissance de l’antériorité de ce qui fait coutume est une glu aux semelles de tout espoir altermondialiste.

Donc, sans placer une culture sur un trône illégitimement justifié, par essence, il ne reste qu’à fouiller l’excellence de chacune pour en extraire ce qui est un terreau du respect de l’humanité dans toutes ses parts et sa logique vitale, dans sa part duale différenciée au nom du Sexe.

Le féminisme protégeant l’enfance par induction. Minoriser les femmes c’est brimer l’enfance, c’est broyer l’humanité dans son espoir même d’être. L’enfance est l’humanité et se retrouve spoliée de cette part d’elle-même en tant que fil de navette. L’enfance se déconstruit ainsi, elle se « dys-construit » dans un système hiérarchisant la répartition hasardeuse naturelle.
Parce que la minorisation féminine définit un cadre éducationnel de logique des strates.

On pourrait supposer que tout changement de la vision culturaliste asseyant la continuité de règles établies en lois, et de définition des ordres hiérarchiques, primordialement sexués, dans la rapidité –évinçant la précipitation qui ne porte pas souvent les clés d’une réalisation- pourrait induire un état de choc nocif, tant par la déstabilisation résultant d’un déboulonnage du socle coutumier et donc du confort des certitudes, que par l’effet d’ivresse libertaire amenant des exigences anarchiques, dispersées et surtout incohérentes.
Mais je crois que ce serait un argument attentiste d’une part et unidirectionnel d’un intérêt partial d’autre part.

Maintenir une part de l’humanité dans un état mineur la place en dépendance et cet état se reporte à toutes les formes de sociétés.
De la micro-société qu’est la cellule familiale la plus restreinte à la giga-société qu’est un pays, la hiérarchisation sexuée instaure une hiérarchisation de fonctionnement général se légitimant par l’état déclaré de faiblesse d’un groupe et de groupes donnés.
La faiblesse définie, sur la base du sexe, des richesses, de la culture préservée, etc. justifiant l’ordre et le droit de décisions élitaires.

© Marie Hurtrel


[1] « altermondoviser » : de « altermonde » (autre monde) et « viser », pour « envisager un autre monde »
[2] « déconifier » : expurger des incohérences
[3] « dénapoléonisé » : détaché des références au code Napoléon
[4] « chosifiante » : avilissante, abaissant à l’état d’objet