Du mariage et de son évolution

Bien sûr que le mariage est une institution très ancienne, et jusqu'au XIXème siècle il était quasiment toujours un arrangement entre familles, pays, métiers ; question d'argent d'une part donc, de nom aussi, et d'autre part, pendant plus longtemps encore, une question de reproduction contrôlée (c'est-à-dire un gage d'avoir des héritiers et que ces descendants soient assurément des gênes du nom qu'ils portaient -comme si les dames enchaînées par contrat ne pouvaient pas aller se faire engrosser à l'autre bout du village par un amoureux quelconque, car oui, l'amour est quelconque dans des propos qui réduisent ainsi le mariage-.
Ô bienfaitrice généalogie qui réveillerait beaucoup de monde sur ce sujet-là de la descendance protégée du fait d'un mariage antérieur à leur arrivée.
« Seules les femmes connaissent le nombre de leurs enfants ».

Il semble apparaître, là, que le mariage a toujours consacré tout sauf l'union naturelle d'un homme et d'une femme, il consacrait surtout l'aliénation de la liberté des femmes, ils les asservissaient et les renvoyaient aux tâches exclusivement ménagères (nourrissage des enfants, cuisine, etc. et pour les plus chanceuses des mariages dits riches, au rôle de potiches décoratives et de phallus pour accompagner la vie et les aspirations sociétales du mari ; avec des droits restreints dans la famille même où elles devaient obéissance à leur mari, ceci pendant très très longtemps... ce mariage consacrait alors (je dirais sur-consacrait) l'infériorité des femmes dans un Code Civil (1804) profondément discriminatoire.
(Ce code napoléonien que certains pays utilisent encore à l'état quasi brut conservant les femmes dans une minorité bien pratique [à esclavage, esclavage et demi...] tous les hommes se mariant n'écrasant pas leur épouse, certes, mais ce mariage napoléonien -et d'essence bien plus ancienne, millénaire sans doute, et plus encore- sert encore, là dans ces lieux copiant nos dérives blanches machistes, tous les fondus de domination et d'exploitation, et d'objetisation des femmes réduites au ventre, et par induction des enfants. Est-ce de cela que certains ont nostalgie à vouloir ralentir voire stopper les évolutions actuelles ? (oui, oui, dis-je, car quand le sexe du mâle ne sert plus à justifier la domination, par extension (de l’idée, pas du sexe, vous aviez compris), la panique vient. Elle était déjà venue, monsieur gonade ayant souvent tremblé sur son trône et s’accroche encore aux traditions qu’il invente tous les jours et enfonce même dans le crâne de sa femelle dépendante au nom de l’équilibre, de Dieu, et de je ne sais quelle crainte d’une perdition de l’humanité.
Oh ! Mais, rassurez-moi, quand on pille l’Afrique pour faire tourner nos turbines nucléaires, ça ne perd pas l’humanité ça, hein ? Ce n’est pas un sujet d’importance, ça, par contre que des humains s’aiment sans distinction de sexes, ah ça, c’est pas bien, tellement qu’il faut afficher le conflit d’idées, et continuer à laisser crever les ouvriers de notre uranium chéri, car ça c’est justifié et bon pour l’humanité ! Est-ce un rêve ou un cauchemar ? Dites-moi ? N’y a-t-il pas à recentrer les peurs sur les vrais dangers ?

Digression géographique, mais revenons dans notre beau pays de France :
- Rappelez-moi, depuis combien de temps est-il écrit "égalité" sur le fronton de nos mairies ? Ah, j'entends l'écho de l'égalité le soir au fond des draps du machisme d'état, il résonne encore, et encore... et se permet de raisonner.

Diable que reconnaître ses égarements est difficile, quand ça roule pour les teneurs de rênes, qu'il est déstabilisant de devoir partager la place du meneur !
Cela a dû être fait, heureusement le mariage a changé et a consacré, en lui-même, la "révélation" que les femmes ne sont pas inférieures (les conflits mondiaux ayant mis en avant leur capacité à se débrouiller sans monsieur, sans ce chef vénéré et tout puissant [oh, ça me rappelle ma centenaire préférée qui avait créé une entreprise de grains et engrais durant la deuxième guerre mondiale et charriait elle-même, du haut de ses petits muscles féminins, des quintaux en sacs pour remplir des remorques à destination des exploitations agricoles menées alors également par des femmes ; et du haut de ses neurones actifs faisait que l'entreprise a grossi, grossi et existe encore... bref, quand le maître n'est pas là, les souris ne dansent pas, elles bossent et prouvent que la force et l'intelligence ne se diplôment pas dans l’univers cité du sexe].
Gardez vos slips, le cerveau et l’humain sont ailleurs.

Donc, en 1965 (faut bien du temps pour réagir), les femmes mariées françaises accèdent enfin à une certaine majorité par le droit de gérer elles-mêmes leur patrimoine –communauté réduite aux acquêts enfin possible, ouf, c’était déjà ça-, d’avoir un compte en banque, de travailler sans demander l’autorisation, etc. Et puis de chef de famille, il n’y a plus à partir de 1970… les mamans qui sont mariées savent prendre des décisions pour leurs mômes et l’autorité (je hais ce mot, mais bon…) se partage. Egalité tu pointes plus que ton nez là, du moins dans les textes. Et, qui dit mariage, dit… enfin le divorce est devenu possible cinq ans plus tard, on avance ! on avançait, et on avancera, j’espère encore longtemps.
Alors, quoi, ce mariage au tracé ancien n’était pas celui de l’amour, mais il semble que l’Etat veuille toujours le faire évoluer vers cette dimension humaine et ce cadeau béni des dieux qu’est l’Amour basé sur l’égalité et la liberté individuelle.

-Parce que, rappelez-moi, depuis combien de temps est-il écrit « Liberté » sur le fronton de nos aimées mairies ?

Venons au sujet cher et brûlant de nos enfants : Environ la moitié des enfants naissent hors mariage (54,8% des naissances en 2010 [src : vie-publique.fr]) et sont éduqués de plus en plus dans des familles monoparentales ou recomposées. Nos enfants sont-ils tous déjantés de ce fait ? Sont-ils tous déséquilibrés ? On rigole, là, non ? Quel enfant a une histoire bien cadrée, formatée, venant d’un moule parfait collant aux rêves de jolie petite prairie autour de la maison ?  Je me dis qu’il faudrait peut-être regarder un peu la vie en face, la vraie vie, pas celle des illusions religieuses sur lesquelles se sont collées beaucoup (toutes ?) d’institutions, religieuses et marchandes d’ailleurs, ça va si bien ensemble... Ah, oui, donc, voilà, le mariage ne fait déjà plus vraiment la famille, si, si, mais l’a-t-il fait un jour ? A part décerner des rôles plus ou moins bien tenus  et masquant surtout longtemps les cafouillages éducatifs et les tripotages décisionnels sur l’avenir des bambins, et pas que sur l’avenir parfois, n’est-ce pas. C’est une réalité. Alors ? Le mariage « traditionnel » rend-il nostalgique ? Au nom de quel conservatisme discriminatoire ?

Allez, questionnons une conclusion : Voilà deux cents ans qu’une échelle tient et supporte le poids de ceux qui veulent y grimper, tiendra-t-elle encore des siècles ? Tout d’un coup, l’on se rend compte que l’usage  n’entretient point la chose, ne la rend pas plus sûre, mais au contraire l’amène à se détruire par usure, et l’on n’accèdera pas au riche fenil par elle, mais aux reins brisés par sa chute. Faut-il envisager de la restaurer avant l’effondrement ? Me semble que oui. Non ?

© Marie Hurtrel