De l'étiquetage

Allez, on ne prend pas les mêmes, et on recommence quand même.

La chose toxique qu’on vous enfonce dans le biberon au sortir du berceau ventral chaleureux et maternel, est que tout se classifie. Las.

Un jour, un zélé, sans doute dopé à l’ennui et envahi d’aspirations au pouvoir, a décidé que le tri ferait la domination pratique et l’ascension aisée (la sienne), il lui en prit donc une inspiration en amenant d’autres : faire le tri pour mieux régner. De l’ordre des divisions si l’on a quelque chose à diviser, évidemment.
Il y a toujours une origine, la raison fait le larron qui fait le dindon. N’est-ce pas. Alors, mettons sur la tête d’un supposé zélé toutes les raisons que d’autres appellent évolution - il n’y a qu’à croire, c’est facile de déplacer un terme pour justifier la globalité des choses -, et nomme l’indispensable et sempiternelle croissance, à nous faire croire que tout monte et doit monter. Sur notre boule terrestre, l’idée contre nature ne fait peur à personne, au contraire, on tourne en rond à penser que l’ascension dirige et s’exige ; de l’omega dans l’omega, ah.

Alors, ce zélé-là s’éprit du marquage, et si ce n’est plus nos peaux qu’on brûle du tatouage appropriatif, l’étiquetage c’est installé au nom de la compromission et permet que l’esclavage perdure.
Celui du penser, de la pensée, de l’esprit, de la croyance à la lucidité du format, et de toutes ces prétentions de liberté attachées au piquet des règles instaurées au nom du commerce - que celui qui ose dire qu’il en est un d’équitable nous lâche avec ses guides malfaisants qui aiguillonnent le choix. Equitable, damned, ça fait joli sur l’étal, mais en-dessous la table est bancale. Bref, digression acide par la vitrine des rustines démonstratives des générosités publicitaires oxydentales -.

Retour à mon cadre matinal toujours chouïa aigre ; on ne boit pas son café les yeux fermés, ni debout : ça fait voir clair quand on est mort. L’adage ramène au lever sur le monde d’une lumière que l’on artificialise à souhait. Du moment que sa myopie demeure, au peuple on laisse la faculté de penser. Dé-penser, à haute et convaincue voix. Drôle d’homophonie. Et de phonie en phobie nous dansons comme ça entre les priorités gouvernementales, c’est si facile d’attirer l’œil sur ce qui brille d’un côté ou brûle de l’autre, ce sont les murs de nos couloirs mortuaires et nous les empruntons si facilement. L’effort décousu par i-ceux mêmes qui ont intérêt à nous faire croire que nous pensons, au moment même où nous énonçons le plus commun des lieux de décérébration : l’avoir et l’admission.

Alors, voilà, le sport préféré de l’individualiste est l’étiquetage. Le zélé ennuyeux et carriériste nous a fait démonstration et loi que l’humain porte sur son dos un tatouage venu de son terreau et de sa route. Et de là se mène l’idée sombre qu’on peut renvoyer dans son cloaque, tout individu faisant bande à part - qu’il fut un dans la pratique ou lot minoritaire - dans la coutume étrange de ne pas coller au tri portant toutes les raisons du « juste » établi. La norme, voyez-vous, ça vous colle l’anorme sous l’uniforme sociétal. Et l’on taxe posément l’humain n’ayant pas glissé dans le moule concentrationnaire, de n’être pas intégré, adapté, voire sociabilisé… et de chercher l’exil à ceux mêmes qui ne connaissent de frontières que les confins planétaires.

On avance ? Croyez-vous ?

Et des dissensions de clochers vient le règne, du zélé et de ses héritiers.

L’humain de batterie, nous y et en sommes. Las. Re-las. C’est avec ça qu’on nous a inventé l’orthographe d’une paix au nom des guerres endo et exo-locales.

Tout ce qui ne file pas défie.
Et ce qui défie doit mourir ou partir, nous dit-on. Mais où ? Puisque la terre est ronde.

Marie HURTREL
2013