Quel est ce monde

Quel est ce monde où la nationalité est un talent ?
Quel est ce monde où le talent se mesure par la mode ?
Quel est ce monde où votre goût définit votre honorabilité ?
Quel est ce monde où l'honorabilité dépend d'un tiroir-caisse ?
Quel est ce monde où l'on vous fait prendre les médailles pour des mérites ?
Et les vessies pour des lanternes ?
Quel est ce monde où l'on conditionne l'amour à l'obéissance ?
Quel est ce monde où seules les étiquettes se prônent et jamais ne s'estime la matière qui les porte ?

Dans un monde de contours où tous les sens font l'inter-dit, il reste la source comme un repli, une sébile cabossée, les bottes des sept adieux.

Il reste l'air brassant le dire, la parole sur les fils tendus des courants continus, de vieux échos ne cessant de battre l'infini, sa coulpe macabre. 

Il reste une rue au loin, sa moiteur en bandoulière, une clef tordue au fond d'une poche cousue, le coeur bloqué entre une étreinte et la mort.

Il reste une pause brûlante comme un café foutu, l'odeur du soir et ses rires diffus.

Il reste ce drôle de silence entre midi et le balancement des pages.

Il reste aussi le suc des sumacs et la mort.

Marie HURTREL